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Introduction au DesignOps

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Introduction au DesignOps

DesignOps, le terme était sur (presque) toutes les lèvres, lors de la Conférence Qui Tue le Game, l’évènement design qui s’est tenu en ligne en novembre dernier, axé sur les évolutions tous azimuts du secteur et de ses métiers.

En 2015 déjà, Adobe l’affirmait : les entreprises qui encouragent la créativité et investissent dans leur expérience client à travers le design, multiplient leur part de marché par 1,5. Cette même année, la Direction Générale des Entreprises, publie Quand le design crée de la valeur pour les entreprises, ouvrage dédié à l’impact du Design.

McKinsey confirme le constat dans son Business value of design en 2018 : les organisations faisant du design une priorité auraient doublé leur chiffre d’affaires par rapport à leurs concurrents. 

De fait, les équipes de design s’accroissent et les designers occupent des postes de plus en plus stratégiques au sein des entreprises. La question de l’organisation et de l’opérationnalisation des équipes de design apparaît alors comme  primordiale. C’est là qu’intervient le DesignOps, afin de permettre une articulation fluide et efficiente des process entre les différents designers, mais aussi entre les équipes design et le reste de la structure.

Une démarche adoptée par de nombreuses entreprises telles que Slack, Visa, Pinterest, Mailchimp ou encore Orange et Thales. 

On vous en développe les grandes lignes en compagnie de Nicolas Chatelain, Design System Designer, membre de l’équipe DesignOps au sein d’Orange, et auteur d’un mémoire sur le sujet.

En quoi consiste le DesignOps ?

Inspiré du DevOps, le DesignOps (ou Design Operations) est avant tout une démarche centrée sur l’humain, un état d’esprit dont l’objectif est d’encourager la créativité, la productivité, la communication ou encore la collaboration au sein des équipes de design.

Notons que le terme “design” fait référence à une multitude de pratiques et d’expertises (UX design, UI design, UX research, UX writing, design de produits, design haptique, design conversationnel), souvent amenées à travailler ensemble. 

Si ces différentes branches du design ont toutes le même objectif – créer la meilleure expérience utilisateur et client possible – elles n’utilisent pas forcément les mêmes process. Le DesignOps permet alors d’opérationnaliser, de systématiser ces collaborations à l’aide de différents outils et méthodes.

Le DesignOps sert également à encourager et organiser la coopération entre les équipes de design et les autres secteurs de l’entreprise (développeur·euse·s, opérationnel, marketing, communication). 

Nous avons demandé à Nicolas Chatelain comment il compléterait ces définitions et il y ajoute une dimension essentielle : la légitimation du design auprès des décideurs. Ce, grâce aux preuves de l’impact positif du design, issues du DesignOps, nous y revenons plus bas.

Le DesignOps défini par les designers

Nicolas Chatelain s’appuie notamment sur ses échanges avec Peter Boersma, ex DesignOps Manager chez Miro, pour nous proposer une définition globale et actualisée du DesignOps : 

  • « L’action de soutenir les designers en lien avec les stakeholders, afin de créer les “meilleures circonstances” pour permettre de produire du “bon design”. » Concrètement, il s’agit de créer une structure opérationnelle autour de la force design ou du lead designer par exemple. 
  • Il souligne cependant que certains considèrent que le DesignOps relève de tout ce qui n’est pas le design, à savoir l’organisation, l’opérationnel, le processing, permettant ainsi aux designers de se concentrer sur leur travail de conception, et de gagner du temps au profit de la production et du delivery.
  • Nicolas Chatelain précise enfin les finalités de DesignOps, rappelant que le travail des designers n’est pas artistique et qu’il s’inscrit dans un contexte précis accompagné d’une promesse de revenus, de rentabilité et d’efficience qui participe à légitimer le design.

En conclusion, il résume :  “Le DesignOps ce sont toutes les actions qui sont menées pour créer et soutenir un écosystème design, un écosystème de conception, afin de mettre le design à l’échelle de l’entreprise. Cela permet de la faire gagner en vélocité, en efficacité et surtout en impact dans tous les travaux où le design est mis à contribution.

UX et DesignOps

Toujours selon Nicolas Chatelain, le lead designer accomplissait déjà naturellement, des tâches “Ops” aux débuts de l’UX, née de l’ergonomie dans les années 60 : afin de créer un cadre, du lien entre les designers, et d’apporter de la cohérence dans leur travail. De fait l’UX est bien présente dans le DesignOps, et les principaux utilisateurs en sont les designers au sein d’une même structure.

D’un point de vue User Centric, le gain de temps généré par un DesignOps efficace, se fait au profit de la R&D, de l’innovation, du temps passé avec l’utilisateur potentiel, et permet de renforcer les liens entre les designers de l’organisation. Autant d’éléments qui profitent non seulement à l’expérience utilisateur, mais aussi à celle du collaborateur.

En effet le DesignOps, permet par un travail collaboratif, un dialogue constant entre designers, mais aussi avec le reste de la structure. Une façon de mettre le collectif au service de la création de process, à travers l’atomic research par exemple.

Comment s’organise le DesignOps ?

Notons au préalable que Kate Kaplan, insights Architect au sein du N/N Group, appelle à éviter le mimétisme en matière de DesignOps :  il s’agit d’un cadre qui bien que standardisé, ne peut se copier d’une structure à une autre, chaque DesignOps étant unique et propre à chaque organisation selon son environnement interne.

Selon N/N Group, l’organisation d’un DesignOps est fondée sur 3 piliers : la collaboration des équipes, les processus de travail et  les résultats.

3 principes du Design Ops

Ainsi le DesignOps est en réalité fortement lié à l’optimisation de l’expérience collaborateur des équipes de design. Il s’agit de mettre en place des outils et des processus qui permettent aux designers de créer, de concevoir dans de meilleures conditions.

Who’s in charge ?

La, le ou ou les responsables de la mise en place et du suivi du DesignOps varient selon les organisations. Nicolas Chatelain nous en donne quelques exemples : 

  • Un.e design lead ;
  • Un.e manager disposant d’une sensibilité ou d’un background design ;
  • Tous les designers à tour de rôle, comme cela est le cas au sein de Renault Digital, dans une démarche pleinement collaborative où chaque designer peut contribuer à faire évoluer le DesignOps ;
  • Des profils dédiés par compétences, comme du community building ;
  • Un.e designer de l’équipe Design Systems ;
  • Un.e référent.e DesignOps, qui, au-delà de l’accompagnement des problématiques design, oriente également les demandes auprès des bons interlocuteurs des différentes équipes. Un rôle de mise en relation qui peut s’avérer essentiel et qui nécessite une compréhension globale des différents enjeux.

La maturité en matière de DesignOps progresse dans les entreprises françaises, Nicolas Chatelain souligne que les offres de postes dédiées au DesignOps, commencent à se faire de plus en plus présentes, notamment dans les environnements dynamiques et ouverts aux nouveautés que constituent les startups et les scale-ups.

Les outils du DesignOps

Le DesignOps fait alors appel à une multitude d’outils liés au processus même de design mais également à l’organisation du travail et des équipes, au partage de données et de connaissances et même au recrutement, en voici une liste non exhaustive :

  • Les outils de travail collaboratif (Miro, Figma, FigJam, InVision, suites Microsoft 360 ou Google) ;
  • Les répertoires de benchmarks et de moodboards ;
  • Les outils de communication et de gestion de projets (Asana, Trello, Monday, Slack, Teams), permettant de centraliser les échanges entre toutes les parties (designers, stakeholders).
  • Les Outils dits “seconds cerveaux” comme Notion, application collaborative, permettant de regrouper les projets pour les rendre accessibles à toutes les équipes, capitalisant ainsi sur ce qui a été fait au cours d’un projet, et créer une legacy design.
  • Les outils de conception visuelle et de production de wireframes, prototypes, etc (Figma, suite Adobe, InVision, Balsamiq, MarvelApp, Procreate).

Happy Designers et légitimation du design

Le DesignOps s’avère être une démarche essentielle pour légitimer le design au sein d’une organisation et au-delà. Son articulation permet en effet aux designers de se faire entendre auprès du COMEX et des décideurs dont dépendent les budgets design.

Les metrics et différents KPI issus du DesignOps sont autant de leviers à présenter au niveau le plus stratégique de l’entreprise pour justifier l’impact et l’importance du design. Une façon de dépasser la polarité créativité vs standardisation, en apportant de la tangibilité et du pragmatisme aux process design, à l’échelle de l’organisation.

Le travail collaboratif et participatif induit par le DesignOps, favorise le sentiment d’appartenance des designers à leur organisation, ainsi que leur épanouissement en tant que collaborateurs. Une démarche Work Together à préserver en 2023, face à la crise économique et au Business First. Vigilance, donc.

Attention cependant, Forrester appelle pour 2023, à ne pas négliger les investissements au profit de l’innovation, de l’EX, de la CX, et par extension, du design ?

Petit lexique du DesignOps

DevOps :

Le DevOps, est le “père” de tous les “Ops” qui lui ont succédé. C’est l’association des mots développement (web) et opérations. Son but est de favoriser la communication et la collaboration entre développeur·euse·s web et les équipes informatiques notamment. 

ResearchOps :

À l’image de Design Ops et du Dev Ops, le Research Ops fait référence à l’opérationnalisation du département de recherche utilisateur. Il sert à soulager les chercheur·euse·s dans l’aspect opérationnel de leur travail tout ou encore à leur faire gagner du temps dans la collecte et le traitement des données de recherche.

Design System :

Un design system est un référentiel évolutif commun aux designers et aux développeur·euse·s pour construire de nouveaux produits ou services numériques. C’est un ensemble formé de quatre éléments : un stock de composants, leur mode d’emploi, les fondements de ces choix et les conditions d’auto-évolution.

Design sprint :

Le design sprint est une méthodologie d’idéation accélérée misant sur la pluridisciplinarité des participants et la contrainte du temps. Généralement mené sur 5 cinq jours, il vise à explorer un maximum d’idées, ne retenir que les meilleures, les prototyper puis les tester.

Atomic Design :

L’atomic design est une méthodologie de conception d’interfaces théorisée par Brad Frost dans son livre éponyme. Son idée est d’adresser la multiplication des écrans et contextes d’usage par la construction de design systems organisés qui rendent les interfaces plus cohérentes.

Atomic Research :

L’atomic research est une approche qui redéfinit les unités de base de la connaissance UX en “atomes” (aussi appelés “nuggets”) taggés. Plus simplement, l’idée est de déstructurer le matériau brut récolté à l’occasion d’une recherche utilisateur afin d’avoir une vision d’ensemble et granulaire avant analyse.

Community Building :

Dans le contexte du Design Ops, il s’agit de créer une communauté en interne, de designers, en construisant un sentiment d’appartenance, une dynamique d’échange de connaissances, et des moments de discussions et de partage comme des random lunchs (inscription des collaborateurs au hasard, à un repas partagé). L’onboarding, en fait partie, à travers les livrets de communication, l’accompagnement et l’orientation du  nouvel arrivant vers les bonnes personnes au sein de la structure. Tous les évènements et initiatives visant à créer la cohésion et l’épanouissement en interne.

Merci à Nicolas Chatelain, Design System Designer passionné opérant au sein de l’équipe DesignOps d’Orange, pour la richesse de nos échanges.

L’UX des talks-shows

L’UX des talks-shows 2883 1533 Wedo studios


L’UX des talks-shows

Nous nous intéressons ce mois-ci à l’UX des talks-shows en tant que levier de captation et de fidélisation des utilisateurs que sont le ou la téléspectateur.rice.

Ce format de programme importé des US fait son apparition en France en 1955, puis se trouve popularisé par Thierry Ardisson et Christophe Dechavanne entre les années 90 et le début des années 2000. Depuis, le genre continue son évolution.

Informer son audience en lui proposant une expérience ludique ? Cela s’appelle de l’infotainment, de l’infodivertissement en français, et les talk shows en font partieNous vous en avons parlé, le spectaculaire s’invite dans notre quotidien : du musée à la politique, mais aussi à la TV, à travers les émissions d’actualités qui se situent entre information et divertissement. 

Ces émissions rivalisent d’audiences comptant plusieurs millions de téléspectateur·rice·s, un succès qui met en lumière des animateur.ices.s devenus tout puissant.e.s ?

Revue de l’UX des plateaux TV : silence, ça tourne !

Le règne de l’infotainment

L’universitaire Umberto Eco a analysé ce phénomène né dans les années 1980 (in La Guerre du faux), en évoquant le passage d’une télévision didactique à une “néo-télévision” qui recherche le spectaculaire et le participatif à tout prix. Les premières concernées sont alors les émissions politiques :

  • En France, en 1981, L’heure de vérité sur Antenne 2 fait apparaître un invité encerclé de journalistes comme dans une arène, et les téléspectateurs sont invités à participer en envoyant des questions par fax qui sont ensuite posées à l’invité.
  • La même année, sur TF1, l’émission 7/7 présentée par Anne Sinclair, met en scène un dialogue entre la journaliste et l’invité politique, dans un cadre sombre et presque intimiste.

Un mélange des genres, une rencontre des univers qui séduit les téléspectateurs

La démarche fait sens selon Michèle Gellereau, professeur émérite en Sciences de l’information et de la communication à l’Université de Lille 3. Selon elle, l’art de réaliser une émission TV consisterait à créer une forme de langage audiovisuel qui permette la rencontre de deux mondes, celui des personnes filmées et celui du public, et qui permettent aux partenaires de construire ensemble cette mise en forme de représentations communes”.

Talk-show, la chasse à l’audience

Ce format hybride, où les stars de la chanson succèdent aux personnalités politiques, tandis que les sujets traitent indifféremment de l’actualité culturelle, sociale, sociétale ou géopolitique, n’a rien de nouveau, mais continue de faire de l’audience, car accessible. Les chaînes s’en servent comme levier stratégique à travers des rendez-vous spectaculaires et différenciants, qui s’appuient sur l’actualité et des invités d’intérêt.

L’animateur principal contribue à porter l’émission, ce “maître de cérémonie” est un protagoniste central dont le statut médiatique et le rôle communicationnel (information, gestion de la parole et des échanges, interviews), mais aussi la personnalité nourrissent une identité de programme forte.

Quelques exemples récents de french talk-shows

L’émission Quotidien de Yann Barthès diffusée sur TMC depuis 2016 a gagné en légitimité au fil des saisons, dernièrement les personnalités politiques vont y booster leur capital sympathie : Elisabeth Borne, Pap N’diaye, ministre de l’éducation, ou Marine Tondelier, nouvelle cheffe du parti écologiste.  

Les différents programmes présentés par Cyril Hanouna sur C8 font également partie du registre, dont Face à Baba relancé en 2022. 

TF1 à remis au goût du jour le late show avec Le Late avec Alain Chabat, volontairement inspiré du Tonight Show, late show américain à succès diffusé sur NBC depuis 1954 et aujourd’hui animé par Jimmy Fallon.

France 2 associe en 2022 à la tête de son émission Quelle Époque !, une journaliste politique, Léa Salamé, en binôme avec un animateur historique Christophe Dechavanne, pour un long format mêlant sociétal, capsules humoristiques et interview politique rythmée. 

A travers la copie de formats américains, d’animateurs ou journalistes stars en tête d’émissions et d’invités prestigieux qui légitiment les programmes, les chaînes rivalisent pour tirer à elles la couverture médiatique sur les créneaux prisés que sont les 1ère et 2e parties de soirées. Les programmes phares font alors figure de marques identifiables.

En 2022 : Face à Baba / Le réalisateur James Cameron chez Quotidien / Le Late avec Alain Chabat / Jean-Luc Mélenchon en invité politique de Quelle époque !

Théâtralisation du spectaculaire TV

Analyser l’UX d’une émission de télévision implique de s’intéresser à son dispositif télévisuel, qui ne doit rien au hasard, notamment pour les émissions dites “de plateau” telles que les talk shows.

Guy Lochard, Professeur émérite à l’Université Sorbonne Nouvelle – Paris 3 définit le dispositif par sa dimension programmée, préméditée, et donc « stratégique » dans la visée de de produire des effets bien spécifiques sur ses spectateurs.

  • Les mises en scène verbale et visuelles

L’identité discursive de l’émission comprend : la rhétorique employée, le mode de gestion de la parole, ses effets sur les protagonistes et les différentes formes d’échanges  (monologue, dialogue, invective, etc.). Le logo du programme, l’habillage, le décor, les dominantes de couleurs et l’éclairage sont essentiels pour définir le plateau, espace physique pensé pour le téléspectateur.

  • Les rôles attribués

Un plateau TV fait  intervenir différents protagonistes qui sont “conditionnés par l’espace médiatique dans lequel ils sont conduits à agir.” Ces rôles conditionnent des échanges à la fois verbaux et corporels. 

La scénographie de l’émission Face à Baba du 18 octobre 2022, animée par Cyril Hanouna, a été étudiée pour placer l’invité, Gérald Darmanin, Ministre de l’Intérieur, assis diamétralement face à l’animateur debout.

Le public présent est invité à s’adresser directement au ministre à l’appel de l’animateur, dans une forme de dialogue. Les spectateurs sortent alors d’un rôle exclusivement passif rythmé par un chauffeur de salle. Les téléspectateurs peuvent eux, réagir en ligne en interpellant le Ministre sur twitter via le hashtag #faceababa ; entre agora et tribunal populaire.

Le Ministre de l’Intérieur face aux spectateurs de l’émission Face à Baba.

Retraitée dans le public, interpellant le Ministre de l’Intérieur dans Face à Baba et CTA avec le hashtag reprenant le nom de l’émission.

Le télespect-acteur, un utilisateur qui a le pouvoir

Lochard précise qu’il convient de distinguer la cible prédéfinie, qu’est le destinataire imaginé à la conception de l’émission, du public effectif. Le chercheur parle de “téléacteur” : un téléspectateur qui est « présenté et construit, non pas comme un récepteur passif, mais comme un véritable “ télé-acteur ” ». 

Différentes “voies de retour” lui sont alors offertes : feu le minitel en son temps, les appels en direct, mais aussi aujourd’hui, la participation par sms ou sur Twitter, les sondages en live ou même l’interpellation des téléspectateurs présents sur le plateau par l’animateur.

Inciter les téléspectateur.rice.s à converser avec l’émission

Claire Sécail, chercheuse au CNRS spécialiste des médias, analyse la pratique :  familiariser le public “avec l’idée qu’un échange politique puisse se jouer sur un mode conversationnel. Un public devenu une communauté née autour de ses émissions et que Cyril Hanouna appelle “la famille”. 

Selon la sémiologue Virginie Spies, cette proximité participe du succès de l’animateur et de ses émissions :  « Il est le premier à avoir compris l’intérêt de l’interaction directe, notamment avec les réseaux sociaux. Alors que le téléspectateur a en général l’impression d’être méprisé, ici, on lui dit : « c’est toi le patron »».

En 1998 déjà, Michèle Gellereau, évoque la manière dont la parole des « gens ordinaires » est intégrée dans des dispositifs de communication retravaillés en fonction des exigences médiatiques (la recherche d’audience).  Ces gens ordinaires en deviennent, des « objets de la représentation télévisuelle »

Focus sur le générique, puissant levier d’identification

Le générique, à la fois incitatif et informatif, occupe une place prépondérante pour rythmer un programme et en véhiculer l’identité, grâce à la mémorisation par la répétition. Il regorge d’indices sur l’univers proposé au téléspectateur et les visées énonciatives à son intention.

C’est le cas des jingles de l’émission Quotidien, qui ont imposé au fil des saisons leur identité visuelle forte, colorée et rythmée en recourant à des images issues de la pop culture accompagnée d’un mix sonore.

Cela facilite la reconnaissance de l’émission en dehors de ses temps de diffusion, lors des replays sur ordinateurs par exemple, ou lorsque des extraits sont relayées sur les réseaux sociaux.

Parmis les éléments structurants du générique : 

  • Le titre : il donne le ton de l’émission et constitue un point d’ancrage dans le processus de séduction du téléspectateur. 
  • L’ouverture : une séquence décisive, pour décliner l’identité des participants, la finalité de l’émission et la thématique traitée dans une stratégie de captation du téléspectateur.
  • La clôture : un temps qui sert à fidéliser le téléspectateur, à annoncer les prochains rendez-vous, et qui rappelle qu’une production télévisuelle est une série en plusieurs émissions tout au long d’une saison.

Générique 2022 du “Petit Q” dans l’émission Quotidien

Conversationnel et participatif, la recette gagnante ?

Les émissions de télévision, et c’est notamment le cas des talk-shows, sont des programmes dont la conception, de la scénographie à l’identité visuelle, laisse peu de place à l’improvisation, afin de séduire l’utilisateur – spectateur. Tout l’enjeu en est la fidélisation de l’audience.

Le public apparaît de plus en plus comme une communauté construite autour d’un programme. Cette démarche permet de faire du spectateur un acteur relais de l’émission, en donnant son avis sur les séquences ou en visionnant des replays ponctués de spots de pub (coucou les recettes publicitaires hors direct). Tous ces éléments constituent un bruit médiatique qui contribue à la popularité d’un programme. La recherche du buzz, par la mise en scène de désaccord, est par exemple un levier fréquemment employé à cette fin ; ce parfois au détriment de l’intelligibilité du débat ?

Les tendances 2023 de Forrester

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Les tendances 2023 de Forrester

En ce dernier mois de l’année, nous vous proposons une sélection des prédictions 2023 du cabinet d’étude et de conseil Forrester portant sur différents secteurs clés. 

Forrester met notamment en garde contre le greenwashing et prodigue des conseils pour adopter la sobriété énergétique, mais également économique, en choisissant soigneusement les dépenses et investissements à poursuivre en 2023. La CX n’est pas en reste et devrait connaître quelques bouleversements. 

Nous avons compilé 5 tendances présentées par Forrester pour appréhender l’année à venir : 

1. Écologie : Éviter à tout prix le greenwashing

L’urgence climatique conduit à une vigilance accrue des consommateurs, de plus en plus attentifs aux communications des organisations sur leur engagement écologique. Une exigence qui peut guider les choix de consommation et challenger la réputation des marques. 

En 2021, 67% des français interrogés par Yougov ont estimé que le greenwashing est une pratique qui s’est trop généralisée, notamment en matière de publicité. En conséquence, les organismes de surveillance, seront plus nombreux à faire respecter le droit à la consommation pour éviter que les consommateurs ne soient trompés sur les initiatives environnementales des marques. La Commission Européenne a par ailleurs épinglé en 2021, lors de son screening annuel, les sites web dont la communication relevait du greenwashing.

Le cabinet conseille d’intégrer la durabilité à tous les échelons de l’entreprise, et notamment de concrétiser l’engagement environnemental par des actions applicables, dont l’impact est mesurable.

Selon Forrester, au moins 10 entreprises encourent une amende de 5M $ ou plus en 2023 pour greenwashing. Le géant italien des hydrocarbures ENI en a fait l’expérience, pénalisé en 2020 d’une amende de 5M € pour publicité mensongère faisant la promotion de son diesel “vert”.

2. IT : Adaptabilité et résilience grâce au cloud

2023 risque d’être une année difficile pour les leaders technologiques, eux aussi confrontés à l’incertitude géopolitique et à la volatilité des marchés. 

La pandémie a accéléré les investissements européens au profit des migrations vers le cloud, tendance qui devrait se prolonger en 2023. Les technologies du cloud permettent selon Forrester une plus grande flexibilité face aux changements en cours, mais aussi de réduire les coûts d’exploitation et d’énergie, un enjeu d’envergure face aux crises énergétiques qui se profilent.

C’est le cas de Carrefour, qui a entamé en 2020 une stratégie move to cloud, qui coure jusqu’en 2026 en s’appuyant sur la solution Google Cloud. Une démarche qui déleste le groupe de l’exploitation de ses 6 data centers tout en lui permettant de réduire ses coûts de fonctionnement de 30%.

3. Work : Préserver et enrichir l’expérience collaborateur

Entre le ralentissement de l’activité, la récession et la grande démission, les entreprises se voient contraintes de réduire leurs effectifs ou de geler leurs embauches. Les talents se font rares et exigeants, en demande de conditions de travail flexibles et de stratégies « anywhere work ». 

C’est l’occasion pour les organisations de se concentrer sur l’expérience des collaborateurs présents, à travers l’écoute des attentes post-pandémie, le dialogue avec les managers et le maintien du travail hybride. L’accompagnement du salarié en interne, à travers la formation, la mobilité interne et une réflexion commune sur le sens au travail est à privilégier. Ce sont autant d’initiatives qui bénéficieront à la marque employeur lorsque la conjoncture et le marché du travail seront plus favorables.

4. CX : Continuer à investir pour améliorer l’expérience client

En temps de crise, la tentation pourrait être, comme en 2008, d’adopter une vision court-termiste axée sur des coupes budgétaires. Les programmes CX qui n’auront pas su prouver leur rentabilité pourraient alors être amenés à disparaître, rationalisation budgétaire oblige. De fait, le risque serait de se focaliser exclusivement sur la performance au détriment de la fidélisation et du brand building.

Malgré le contexte volatile, Forrester recommande donc de voir à long terme, en continuant à investir dans l’innovation, mais aussi dans l’analyse de la clientèle, les plateformes d’expérimentation user-testing et la communication post-vente. Les organisations qui auront pris le risque de préserver les budgets CX, sauront se différencier par rapport à celles qui auront joué la sécurité.

Par ailleurs, le marché des solutions digitales CX pourrait connaître des bouleversements tels que des changements de propriétaire ou des rachats par de grands acteurs du secteur. Ces derniers chercheront à acquérir les fournisseurs spécialisés sur un seul produit ou service, comme une application de cartographie des parcours client, un outil de conception ou un chatbot.

5. Industries : Sobriété énergétique et chasse aux dépenses

Certains fabricants et industriels verront leur facture d’électricité multipliée par 10 en 2023. À cela s’ajoutent les menaces de délestages, ces coupures d’électricité ponctuelles, maîtrisées et de courte durée, effectuées pour conserver l’intégrité du système électrique. Les fabricants se penchent donc sur les sources d’énergie alternatives, comme l’hydrogène et les énergies renouvelables. 

Le suivi et la gestion de la consommation d’énergie, aidés par les capteurs IdO, occuperont une place prépondérante en 2023 pour limiter et optimiser les dépenses énergétiques (Internet des Objets : à savoir l’automatisation des actions sans intervention humaine grâce à la collecte de données effectués par des capteurs dans un environnement donné).

Forrester encourage également à réduire les dépenses “non probantes”. La liste du cabinet comprend les dépenses liées aux contrats de logiciels surchargés, qui pourront être renégociés en 2023 sur un marché hautement concurrentiel, ou encore les partenariats avec des fournisseurs de données tierces de faible qualité.

Sobriété et agilité en 2023

Si la sobriété tous azimuts semble de mise pour 2023, certains investissements stratégiques au profit de l’expérience collaborateur et client (l’une et l’autre vont souvent de pair), seront à privilégier. Fidéliser ces deux acteurs essentiels pour une organisation, nécessitera une écoute accrue.

L’adaptation devient pour les organisations, l’enjeu d’un quotidien qui semble de plus en plus imprévisible, qu’il s’agisse de géopolitique, de climat environnemental ou social. L’occasion de gagner en agilité ?

Antipersonas, l’appréhension du risque

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Antipersonas, l’appréhension du risque

Comme son nom l’indique, l’antipersona s’oppose au persona, c’est-à-dire à l’utilisateur.rice modèle d’un produit ou d’un service. Quel intérêt alors ? Connaître son “ennemi” est toujours riche d’enseignements, notamment pour préserver son utilisateur-cible en identifiant les points faibles de l’expérience qui lui est proposée. 

La démarche de création d’antipersonas s’inscrit globalement dans le cadre d’une stratégie de Risk Management, afin de prévenir les usages abusifs qui pourraient avoir des conséquences négatives à long terme pour l’organisation.

Pour ce faire, évaluer les pires scénarios de comportements d’un.e utilisateur.rice indésirable, passe par la définition d’un ou plusieurs antipersonas.

Voir au delà de l’utilisateur·rice cible

Selon N/N Group, l’antipersona est une représentation d’un groupe d’utilisateur·rice·s qui pourrait abuser d’un produit ou d’un service de manière à avoir un impact négatif sur les utilisateur·rice·s cibles et l’entreprise. Si l’utilisation d’un produit ou d’un service peut engendrer des risques physiques ou émotionnels, il est souhaitable d’anticiper ces préjudices en définissant un antipersona pour chacun de ces risques. C’est notamment le cas pour les produits qui sont ou pourraient être utilisés par des enfants.

Cette méthode peut ainsi être employée ponctuellement pour affiner l’analyse des risques majeurs liés à un secteur donné ou dans le cas de produits ou services particuliers, pouvant présenter une menace à l’utilisation.

L’antipersona permet alors aux chercheurs, aux designers et aux organisations d’anticiper et de trouver des solutions aux risques identifiés. Typiquement, un fabricant de coffre-forts a tout intérêt à définir l’antipersona d’un utilisateur indésirable : le voleur.

Exemples de risques pouvant nécessiter la création d’antipersona : 

Prévenir une mauvaise utilisation ou une utilisation abusive

L’utilisation détournée d’un produit ou service à d’autres fins que celles imaginées lors de la conception, est un cas de figure qui peut être devancé grâce à l’antipersona.

L’antipersona pour s’adapter aux transformations de son environnement : l’exemple de Vélib

En 2007, la Mairie de Paris lance son service de vélos en libre service dans l’objectif d’inciter les Parisien.ne.s à délaisser leurs véhicules et pour désengorger les transports en commun. 15 ans après, un autre utilisateur a fait son apparition dans la capitale : le coursier à vélo. 

Cette utilisation intensive des Vélib comme outil professionnel au profit des entreprises de livraison, n’avait pas été anticipée. Conséquences pour l’utilisateur-cible :  l’indisponibilité des vélos, et pour l’organisation, une usure accélérée qui demande un remplacement fréquent. 

L’augmentation des tarifs et l’interdiction d’utilisation des Vélib à des fins de livraison en 2020 n’a pas suffi à corriger cet usage. La création d’un antipersona aurait permis d’imaginer une offre de service dédiée à cet utilisateur particulier et par extension aux entreprises qui en sont les employeurs. Cela aurait également pu ouvrir des pistes de réflexion quant à la gestion de la disponibilité pour l’utilisateur initial.

L’antipersona avant de lancer ou de faire évoluer une offre de service : l’exemple de Twitter

A l’automne 2022, Elon Musk, tout juste propriétaire de Twitter, décide de généraliser l’obtention du “Twitter Blue”, moyennant un abonnement mensuel de 8$. Cette coche bleue initialement réservée aux comptes certifiés, a rapidement été détournée par des internautes se faisant passer pour des entreprises. 

Les messages fallacieux de faux comptes Twitter se sont multipliés, entraînant la désactivation de cette option, quelques semaines après son lancement. L’antipersona est ici tout trouvé : les Twittos créateurs ou diffuseurs de désinformation, qui se sont emparés de cette nouvelle fonctionnalité.

Exclure les utilisateur·rice·s non cibles

L’antipersona peut aussi permettre d’identifier des utilisateur·trice·s qui pourraient penser que le produit ou le service proposé est adapté à leur besoins, alors que ce n’est pas le cas. 

La problématique UX s’étend alors à celle du marketing et de la communication : savoir identifier ces utilisateur·rice·s afin de pouvoir leur expliquer que la solution n’est pas faite pour eux. Cela permet de limiter les problématiques de conversion client, les expériences client négatives et les sollicitations inutiles du service client. Pour une marque ou une organisation, c’est l’occasion de redéfinir son branding.

Définir les antipersonas

Créer  un antipersona débute par une identification des menaces liées à l’utilisation du produit, service ou de la solution proposés. Si la plupart des catégories ci-dessous se retrouvent dans tous les personas,  ce qui distingue l’antipersona, c’est l’attention portée aux conséquences de ses actions. Rappel des informations que doit comprendre l’antipersona : 

  1. Un nom et un visage
  2. Ses objectifs
  3. Ses motivations
  4. Ses actions 
  5. Ses outils
  6. Ses besoins
  7. Les conséquences de ses actions

Plusieurs questions peuvent être posées pour guider ce travail  : 

  • Quels sont les objectifs et les motivations de l’antipersona ?
  • Quels sont les outils qui pourraient lui permettre d’atteindre cet objectif et quelles en seraient les conséquences ?
  • Quelles sont les protections manquantes qui pourraient permettre à l’antipersona d’atteindre ses objectifs ?

Un choix méthodologique à évaluer

Il est à noter que la création d’antipersonas requiert temps et ressources, les avantages de cette démarche doivent être évalués et primer sur les ressources investies. 

Au-delà des enjeux de sécurité, la méthode des antipersonas pourrait-elle être envisagée par une organisation pour s’interroger sur les actions que pourrait mettre en place un utilisateur pour lui nuire ?

Customer Experience (CX), adopter « l’obsession du client » ?

Customer Experience (CX), adopter « l’obsession du client » ? 2883 1533 Wedo studios


Customer Experience (CX), adopter « l’obsession du client » ?

En 2021, 89% des organisations ont déclaré donner la priorité à l’amélioration de l’expérience client et 85% à la proximité avec les clients, afin de concrétiser leur vision en matière de Customer Experience (CX).

L’expérience client englobe toutes les perceptions ressenties par un.e client.e à propos d’une organisation tout au long de leur relation. Il s’agit d’impressions sur l’entreprise, mais aussi, sur ses employés, la valeur de ses produits et services, l’expérience offerte à leur achat et usage et la qualité des interactions avec l’organisation. La collecte et l’analyse des données et retours clients permet d’évaluer et d’améliorer ces perceptions.

La CX fait ainsi référence à la manière dont les entreprises interagissent avec leurs client·e·s, sur différents points de contact à travers la publicité, la vente, le service client ou encore le service après-vente. 

A suivre, l’historique de la CX, ses principes structurants et l’inévitable comparatif avec l’UX.

Historique de la CX, de Mad Men aux réseaux sociaux selon Jared Spool

  • 60’s : La Customer Experience (CX) est née dans les années 60, aux débuts de la publicité à la Mad Men :  âge d’or des agences de publicités américaines concentrées à Manhattan.  Les pionniers du marketing se rendent vite compte que tous les clients ne sont pas identiques, que ceux avec des enfants achètent d’autres produits que les célibataires, et que ceux qui vivent en milieux ruraux consomment différemment des citadins. Aux collectes de données socio démographiques, s’ajoutent celles de données comportementales et attitudinales et la notion de marché segmenté selon des groupes de consommateurs se précise.
  • 2000’s :  Au début des années 2000, la Voice of the customer (VOC) émerge dans l’objectif d’identifier de manière plus fine les besoins des clients pour pouvoir les satisfaire, notamment en commandant des études auprès d’instituts ou en s’appuyant sur les feedbacks du service client. Aujourd’hui, cette méthodologie employée au service de la CX permet de proposer quasiment en temps réel, une collecte des ressentis et besoins du client, adaptée aux réalités du numérique.
  • 2010’s : Selon Jared Spool, chercheur UX, l’avènement des réseaux sociaux a rédéfini le partage d’expérience : les experts marketing ont constaté qu’une expérience réussie était facilement partagée par le client satisfait sur ses réseaux. Le bouche à oreille numérique apparaît comme un outil puissant. Le Social Listening se systématise.

Par la suite, la CX aurait été popularisée ces dernières années par les conférences du cabinet Forrester, dont les études sont dédiées à la “centricité client” et promeuvent une démarche favorisant une amélioration continue de l’expérience client. 

Aujourd’hui, la CX est une méthodologie à part entière, dont la mise en œuvre s’est structurée pour faire partie intégrante de la stratégie d’une organisation. Des équipes y sont dédiées, des principes organisent la démarche, et différents outils et indicateurs permettent d’analyser l’expérience client, et cela, en interaction avec les équipes UX. La CX en vient aujourd’hui à faire partie de l’identité d’une marque.

CX vs UX ? 

“Ils veulent tous que l’organisation offre la meilleure expérience à toute personne qui interagit avec les produits ou services de leur organisation.” — Jared Spool, à propos des équipes CX et UX en 2019.

La CX se dédie à créer une expérience d’achat différenciante et mémorable, mais aussi à recueillir la parole de l’utilisateur et client après l’achat à travers différentes méthodes : études, social listening, VOC, remontées des services clients, mise en place de dialogues avec les utilisateurs.

L’UX se consacre dès la conception du produit ou du service, à créer une expérience utilisateur fluide, ergonomique et positive, en s’appuyant sur la recherche et les tests utilisateurs, les ateliers de co-constructions et les entretiens et le design de service. 

Afin de suivre l’ensemble du parcours de l’expérience client, de la conception en passant par l’achat, puis l’utilisation du produit/service proposé, CX et UX doivent se compléter et interagir en mettant en commun leurs enseignements respectifs, comparatif : 

Tableau comparaison CX et UX

6 principes pour adopter une démarche CX

L’un des piliers de la centricité client est de permettre à chaque membre de l’organisation de pouvoir se concentrer sur le client. De la direction générale aux équipes UX, cette démarche doit être présente dès la conception. En 2018, Denise Yohn a identifié en 6 principes qui restent d’actualité pour  : 

  • Opérationnaliser l’empathie client : les cadres de l’organisation, ainsi que les responsables UX et CX,  doivent s’assurer que chaque employé est conscient des points faibles de l’expérience proposée aux clients. La compréhension de leurs besoins est essentielle.
  • S’assurer que les nouvelles recrues de l’organisation fassent des besoins du client une priorité : le rôle des équipes UX est alors d’intégrer des formations et ateliers UX à l’onboarding, pour permettre aux nouveaux membres des équipes de de connaître l’utilisateur/client de l’organisation.
  • Démocratiser les insights clients : chaque employé doit comprendre les points d’amélioration de l’expérience client identifiés, mais également les actions prévues en ce sens. Anticiper l’expérience client dans un avenir proche, dans 5 ans par exemple, permet de communiquer la vision de l’organisation à tous, et d’évaluer le travail restant. Une vision à élaborer par les équipes CX et UX.
  • Faciliter l’interaction directe avec les clients : même les employés qui travaillent dans des fonctions back-office et qui ne sont pas en interaction directe avec les clients doivent comprendre comment leur travail affecte l’expérience utilisateur. Une observation directe du client en interaction avec le produit ou service, mais aussi de l’utilisateur en action avec le service client est préconisée. L’ensemble du parcours du client doit être observé et connu de tous les collaborateurs. 
  • Monitorer les résultats et les communiquer : les équipes UX et/ou CX doivent proposer des KPI, mais aussi des informations sur les résultats des mesures prises pour améliorer l’expérience client, et s’assurer que les collaborateurs puissent prendre la mesure de l’impact de leur travail sur la réalisation des objectifs fixés.
  • Associer culture d’entreprise et stratégies centrées sur le client : en récompensant les collaborateurs, par un programme de rémunération ou d’intéressement à court terme, qui refléterait les performances de l’entreprise, grâce à l’efficacité des mesures de fidélisation par exemple. Une manière de rendre tangible les contributions de chaque collaborateur à l’amélioration de l’expérience client.

La CX en 2023 selon Forrester 

Selon le cabinet d’études, 4 équipes CX sur 5 en 2023, pâtiront d’un manque critique de compétences en design, conception d’enquêtes ou en traitement de données à cause de   la faible maturité de la majorité des organisations en matière de CX. Toujours selon Forrester, il y a autant de modèles d’équipe CX que d’organisations. Les programmes CX qui n’auront pas su prouver leur rentabilité seront amenés à disparaître, rationalisation budgétaire oblige.

Les grandes marques ont cependant réussi à maintenir la qualité de leur CX en 2021 et 2022,  la “qualité émotionnelle” des expériences proposées (génératrices d’émotions positives). Adopter « l’obsession du client” et des innovations CX différenciantes, telle serait la clé du succès.

La CX pour tous ?

La CX requiert un dispositif qui demande des investissements, du temps et des expérimentations avant d’obtenir des résultats. La mise en œuvre d’équipes CX pertinentes pourrait être inégalitaire selon les structures et dépendre de la taille, de la maturité de l’entreprise, et des moyens susceptibles d’y être affectés. 

Comment faire face aux attentes d’un client de plus en plus exigeant ? Pour initier une démarche CX efficace, le data driven design permet de faciliter la lecture, la compréhension et l’analyse des données collectées afin qu’elles soient compréhensibles par toutes les équipes impliquées et transformées en leviers d’amélioration.

Le petit lexique de la CX

L’Obsession Client

Selon une étude Forrester, “l’Obsession Client est une stratégie concurrentielle à long terme qui repose sur la capacité à écouter et à réagir à la voix du client en temps réel.” 

Voice Of Customer (VOC)

La VOC est une méthodologie qui permet de collecter les sentiments des client·e·s vis-à-vis d’un produit ou d’un service. 

Le recueil de la VOC se fait aujourd’hui au-delà des études commandées aux instituts de sondages et du service client, et se caractérise par la multiplication des canaux et points de contact : live chat, dispositifs de recueil de la satisfaction et de notation, etc.

La méthodologie se base sur les sentiments des utilisateurs à travers leurs mots, et se compose de 4 étapes ainsi identifiées : 

  • La collecte de données qualitatives et quantitatives.
  • L’analyse des feedbacks
  • La hiérarchisation et la mise en place d’actions
  • Le suivi et l’évaluation
Social Listening

Il s’agit d’une technique de veille qui consiste à s’informer régulièrement des avis des client·e·s sur son produit ou service via les réseaux sociaux, les blogs, les forums, etc. Également utilisé dans la VOC, le social listening permet de se rapprocher de ses client·e·s et de mieux comprendre leurs besoins. 

L’UX des musées : Le spectaculaire muséal 2.0

L’UX des musées : Le spectaculaire muséal 2.0 2883 1533 Wedo studios


L’UX des musées : Le spectaculaire muséal 2.0

Dans le monde, 230 millions de personnes ont visité les musées en 2019 contre 71 millions en 2021, malgré la reprise des activités culturelles (Source : The Art Newspaper). En France, il s’agirait d’une baisse de 65% de la fréquentation selon le Ministère de la Culture.

Les expositions temporaires se font alors “blockbuster” : toujours plus visuelles, graphiques, immersives et interactives pour conquérir de nouveaux publics.

En 6 mois, la très visuelle (et instagrammable) exposition Pop Air qui s’est achevée en septembre à la Villette à Paris – après prolongation – a réuni 723 000 visiteur·euse·s, se rapprochant du million annuel des grands musées de la capitale.

Le spectaculaire muséal théorisé par François Mairesse se transforme au prisme des réseaux sociaux et du numérique. Les visiteur·euse·s sont invité·e·s, voire incité·e·s par les musées à se faire le relais sur les réseaux, à travers leurs plus beaux clichés de ces expositions-évènements. 66,9 millions, c’est le nombre de vues que comptabilise le hashtag #exposition sur TikTok. 

Passage en revue de l’expérience visiteur des musées en 2022.

Le spectaculaire muséal se réinvente

Dans son ouvrage, Le musée, temple spectaculaire. Une histoire du projet muséal (2002), François Mairesse décrit l’entrée des musées dans l’ère du spectacle selon 4 critères : 

  • L’architecture de génie qui évoque l’accueil des œuvres au sein d’architectures phénoménales ou insolites, comme le Centre Pompidou, le musée Guggenheim à Bilbao ou plus récemment la Fondation Vuitton et le Louvre Abu Dhabi. La sémioticienne Isabella Pezzini évoque quant à elle, des musées qui “sont eux-mêmes des œuvres”, des “icônes métropolitaines”, qui constituent des points de repère pour les citoyens.
  • La primauté de la technique qui renvoie à l’utilisation des nouvelles technologies dans les domaines muséaux (recherche, préservation, exposition) et également à l’idée de consommation de l’art (produits dérivés, librairies, restaurants, boutiques).
  • Le règne de l’événementiel que traduit le développement des expositions temporaires, ancrées dans l’actualité et qui éclipsent parfois les collections permanentes.

Nous sommes tentés d’y ajouter un 5e critère, l’avènement du participatif : 

Le visiteur est de plus en plus  invité à être acteur de sa visite en partageant ses clichés sur les réseaux sociaux via les hashtags, comme en témoigne la charte des bonnes pratiques dans les établissements patrimoniaux : “Ces dernières années, la pratique photographique et filmique dans les musées et les monuments est devenue un phénomène courant qui trouve souvent son prolongement sur les réseaux sociaux. (Ministère de la Culture – 2014).

Le participatif s’invite également dans l’incitation faite au visiteur de partager son retour d’expérience : livre d’or numérique, borne permettant d’évaluer sa satisfaction en fin d’exposition, enquêtes in situ en face à face à l’issue de la visite.

Mise en scène du soi et de l’oeuvre dans des musées devenus “instagrammables”

La pratique photographique dans les musées n’est pas récente et remonte au XIXe siècle – mais elle a été révolutionnée par le partage de photos personnelles sur des plateformes numériques.

Sébastien Appiotti, chercheur en communication et auteur de l’ouvrage Prendre des photos au musée nous expose la notion “d’image conversationnelle” : l’image ne sert plus seulement de souvenir, elle est faite pour être partagée, pour être un “embrayeur de conversation.” 

Une conversation qui se fait à la fois avec l’image, mais également à propos de l’image et de son sujet ; entre le visiteur et l’œuvre, mais aussi entre visiteurs. Le visiteur se met en scène, à l’image d’un  shooting photo dans la finalité de s’exposer sur les réseaux sociaux. 

A voir : 

Le compte instagram Match with art, en est une belle illustration. La tenue de la créatrice de contenu, visiteuse esthète, est pensée pour s’accorder avec l’œuvre, créant par là une œuvre nouvelle à travers sa photo.

Le spectaculaire muséal dans la pratique photographique
Le spectaculaire muséal dans la pratique photographique
Le spectaculaire muséal dans la pratique photographique

Publications Instagram du compte @matchwithart

Du “no pic” à l’incitation photographique 

Il aura fallu une polémique en 2015 impliquant la Ministre de la Culture d’alors, Fleur Pellerin, pour que le Musée d’Orsay lève son interdiction de prendre des photos qui courait depuis 2010 !

Les temps ont bien changé :  de plus en plus de musées et d’expositions repensent leur parcours autour de la pratique photographique que ce soit dans la signalétique ou la scénographie. 

Travail des lumières pour optimiser les prises de vues, couleur des murs ou encore installation de miroirs (au mur, au sol, au plafond), tout est fait pour rendre l’expérience “instagrammable”, dans une recherche esthétique. Exemples récents : le Musée de l’Illusion à Paris, l’exposition Pop Air à la Villette, Smile Safari à Lille et l’Ice Cream Museum à New-York.

Expositions instagrammables

Le musée de l’Illusion à Paris, le Smile Safari à Lille et la récente exposition PopAir de la Villette cumulent des milliers de publications sur Instagram.

Nous avons visité pour vous l’exposition Shiny Gold à la Gaîté Lyrique, par ici pour notre expérience visiteur

L’explicitation d’une signalétique permissive, voire  incitative

Ce qui a évolué c’est tout ce qui est lié à la mise en circulation d’images en lien avec le numérique et les réseaux sociaux. Sébastien Appiotti évoque une “explicitation de la signalétique” pour favoriser la prise de vue pendant les parcours au sein du musée :

  • Présence en début d’exposition d’une signalétique autorisant la pratique photographique conditionnée à certaines interdictions, comme l’absence de flash, de trépied ou de perche à selfie.
  • Une signalétique dédiée aux “temps morts” ou de transition pendant le parcours, mis à profit pour inciter la prise de vue, parfois à l’appui d’un hashtag spécifique qui permet de relayer l’image sur les réseaux sociaux. 
  • La mise en place de photocalls ou de social feed walls, écrans qui diffusent en temps réel les participations des visiteurs avec le hashtag dédié.

Une transformation qui peut menacer le confort de la visite 

Côté visiteur, la recherche de l’instagrammable se fait parfois au détriment de l’expérience utilisateur.

De nombreuses expositions, extrêmement populaires sur les réseaux sociaux, se sont avérées décevantes pour les visiteur·euse·s, rattrapé.e.s par les aléas du réel : affluence importante, temps d’attente, manque de réelle interactivité avec les œuvres. 

De plus en plus proposée au sein du parcours de visite, la notion d’interactivité dans les musées ne date pas d’hier et prend une grande part dans l’expérience visiteur. 

L’interactivité dans les musées, des 70’s à nos jours

L’interactivité est abordée dès les années 70, notamment dans les projets muséologiques des centres de sciences et techniques, comme celui de l’Exploratorium de San Francisco. Ce musée précurseur des musées scientifiques, a été créé par Frank Oppenheimer, et a par ailleurs inspiré le projet de création du musée de la Villette fondé en 1979

Selon Joëlle Le Marec, docteure en sociologie, l’interactivité s’appliqueà toutes sortes de manipulations techniques, d’expérimentations, d’explorations, nécessitant une participation active de la part du visiteur.  

Aujourd’hui, les nouvelles technologies sont mises au service de l’interactivité avec les visiteur·euse·s, à travers différents dispositifs multimédias, notamment dans des visées ludiques ou éducatives. 

Main Page du site web de l’Exploratorium

La présence de miroirs est courante pour créer l’interaction entre les visiteur·euse·s et les oeuvres ou le lieu d’exposition mais pourrait au moins dater de la Galerie des Glaces du Château de Versailles (1678).

Aujourd’hui, l’utilisation de miroirs dans les musées incite à la prise de vues et de selfies (cf. l’Atelier des Lumières, le Musée de l’Illusion, l’exposition Thierry Mugler au Musée des Arts Décoratifs, l’installation Olafur Eliasson à la Fondation Louis Vuitton). 

Tik Tok tout puissant

Le réseau social au milliard d’utilisateur·rice·s se positionne comme un levier de communication indispensable, au service de  la visibilité et de l’attractivité du secteur muséal.

Le Centre Pompidou, le MUCEM, les musées d’Orsay et de l’Armée… De plus en plus de grands musées possèdent un compte officiel sur TikTok, pour y  partager leur actualité : agenda de la semaine, expositions en cours, lives, capsules didactiques. 

Les hashtags #exposition, #expoparis ou encore #museeparis rassemblent des centaines de vidéos et comptabilisent des millions de vues. Pendant le confinement, Tik Tok a lancé en 2020 et en 2021, deux saison culturelles sous le hashtag #CultureTikTok », en partenariat avec de grands musées.

Un établissement patrimonial historique sur Tik Tok : le Musée de l’Armée 

Il s’agit du musée le plus visité lors des journées du Patrimoine de 2019 et 2022, avec 30932 visiteurs cette année. Sa présence au sein de l’Hôtel des Invalides abritant le tombeau de Napoléon 1er, n’est sans doute pas étrangère à ce succès. 

Joséphine Dezellus, Cheffe du département des études dans la direction du développement et des publics du Musée de l’Armée, nous indique cependant une fréquentation en augmentation, notamment chez les 18-25 ans. Les résultats d’une politique d’attractivité assumée auprès de cette cible prioritaire, qui bénéficie de la gratuité dans l’objectif de poursuivre une pratique culturelle après le cadre scolaire.

Présent sur Tik Tok depuis fin 2020, le musée compte 82K abonnés. Parmi ses vidéos les plus lues, des contenus en référence à la culture geek (jeux vidéos The Witcher, Battlefield 1 ou encore la série Game of Thrones), habilement reliés aux objets conservés dans le musée. La démarche témoigne de la manière dont le savoir-faire muséal poursuit sa transformation au prisme des enseignements du tout-virtuel imposé par la crise Covid.

Musée des armées sur TikTok
Musée des armées sur TikTok
Musée des armées sur TikTok

Publications Tik Tok du musée de l’Armée

Activisme et spectaculaire muséal 

Les musées, temples sacrés de la culture, gardiens d’un patrimoine offert au yeux de tous, sont actuellement les lieux symboliques ciblés par les activistes écologiques pour faire entendre leur voix. 

Selon Sébastien Appiotti, ses actions sont conçues pour être spectaculaires grâce à des images choc et virales pensées pour interpeller. Elles participent d’une stratégie fondée sur une  “photogénie de l’action”.

Une façon d’interroger notre rapport sacralisé à l’œuvre, à l’art, tout comme de questionner pourquoi pas, les pratiques RSE des musées et leurs mécènes.

Merci à nos contributeurs de novembre, Joséphine Dezellus, Cheffe du département des études dans la direction du développement et des publics au sein du Musée de l’Armée et Sébastien Appiotti, Maître de conférences en sciences de l’information et de la communication au Celsa – Sorbonne Université pour leurs regards experts.

L’UX des musées : L’exposition Shiny Gold

L’UX des musées : L’exposition Shiny Gold 2883 1533 Wedo studios


L’UX des musées : L’exposition Shiny Gold

Poursuivons notre exploration du spectaculaire muséal avec l’exposition Shiny Gold de l’artiste Nelly Ben Hayoun-Stépanian.

L’exposition temporaire, qui s’est tenue au mois d’octobre à la Gaîté Lyrique, nous a attiré pour sa dominante dorée en hommage au soleil et à l’or. Composée de plusieurs sculptures gonflables invitant à l’interaction, Shiny Gold était le terrain parfait pour observer le parcours visiteur en 2022.

Shiny Gold, l’interaction ludique

Avant même d’entrer dans la salle d’exposition, il nous a été demandé d’enlever nos chaussures, une action qui initie l’immersion tout en imposant déjà une forme d’interaction entre les visiteur·euse·s et l’œuvre

Il était possible de toucher la majorité des éléments de l’exposition, à l’exception des champignons. Si le geste est d’abord timide – on touche les sculptures du bout des doigts – il devient rapidement plus franc et ludique.

Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - signalisation
Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - interaction

De la surface d’exposition à l’aire de jeu

Sans aucune signalétique de parcours, les visiteur·euse·s sont libres d’aller et venir et d’interagir avec les œuvres selon leurs envies. L’exposition devient alors un véritable lieu de divertissement et d’échanges

S’allonger dans la piscine à balles, traverser le tunnel intestin le plus vite possible, se poser sur le sol doré, discuter sous les tentacules du poulpe… sont autant d’interactions auxquelles nous avons assisté lors de notre visite.

Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - interaction
Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - interaction
Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - interaction
Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - interaction

Les différents éléments de l’exposition Shiny Gold

L’image conversationnelle sur Instagram

La présence du téléphone est omniprésente lors de l’exposition :

  • Pour scanner le QR code à l’entrée qui permet d’avoir des informations sur l’exposition et l’artiste : à part un panneau peu visible à l’entrée et la présence de 2 médiateurs, il n’y a pas d’indications sur le symbolisme des sculptures.
  • Pour prendre des photos, évidemment : avec son ambiance dorée, ses lumières colorées et ses œuvres immersives, l’exposition Shiny Gold était le terrain parfait pour les “shootings” Instagram.

Les visiteur·euse·s n’hésitent pas à poser avec les œuvres : entre les tentacules du poulpe, les bras englobant le soleil, la tête dans la piscine à balles, etc. C’est une étape de plus où les visiteur·euse·s font partie intégrante de l’œuvre et sont autorisé·e·s à se l’approprier à l’envie.

Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - TikTok
Exposition Shiny Gold Gaité Lyrique - Instagram

L’exposition Shiny Gold sur Instagram et TikTok

Une attractivité qui menace l’expérience de visite ?

Si nous avons pris un grand plaisir à nous plonger dans l’univers de l’artiste, à se laisser emporter par le ludique de l’exposition et le jeu photographique, nous avons eu la chance d’en profiter à un moment de faible affluence. Interrogés sur le sujet, le personnel de l’expo nous a confié que les jours de week-ends, l’exposition fait salle comble et l’attente peut s’avérer longue.

Côté visiteur, la recherche de l’instagrammable scénarisée par l’espace d’exposition pourrait parfois se faire au détriment de confort de visite. De nombreuses expositions, extrêmement populaires sur les réseaux sociaux, ont pu s’ avérer décevantes pour les visiteur·euse·s, rattrapé.e.s par les aléas du réel : affluence importante, temps d’attente, manque de réelle interactivité avec les œuvres.

Quel serait alors le parti pris des musées, la politique du nombre l’emporterait-elle ?

La recherche du confort de visite, pourrait notamment dans les grandes capitales culturelles, devenir un enjeu à part entière à la conception des expositions.

Un outil pour accélérer la transition énergétique des bâtiments

Un outil pour accélérer la transition énergétique des bâtiments 2148 779 Wedo studios

Ateliers

UX Writting

Design UI

Pour relever le défi de la transition écologique, l’État a mis en place un Plan de relance passant notamment par la rénovation du bâti et la lutte contre les passoires thermiques. Afin de mieux les repérer, les données sur la thermosensibilité collectées par Enedis permettent une vue granulaire de la consommation énergétique des bâtiments.

Nous avons accompagné Enedis pour faciliter l’accès, la lecture des données dites “thermosensibles” et augmenter fortement leur impact positif sur l’environnement. Cette démarche de vulgarisation des données complexes, a mêlé analyse ergonomique, sémantique (UX Writting) et maquettage d’interface (Design UI).

Problématique

Comment avons-nous simplifié la lecture des données de thermosensibilité, en travaillant exclusivement sur Excel ?

1. Dix entretiens semi-directifs auprès des collectivités territoriales

Nous avons débuté notre étude par la réalisation de plusieurs entretiens avec les utilisateurs cibles des données de thermosensibilité : élus locaux, experts municipaux, syndicats de l’énergie. L’objectif était d’explorer les usages actuels des données par ces acteurs et de tester leur capacité à manipuler le fichier Excel existant.

Les avis et usages recensés furent majoritairement concordants : le service est méconnu malgré son utilité et la notion de thermosensibilité est difficile à appréhender.

Afin de circonscrire les besoins de chacun des enquêté.e.s, nous avons construit 3 personas types, cartographié leurs parcours et recensé leurs besoins. Nous avons également réalisé un audit ergonomique et sémantique.

2. Deux ateliers de co-construction avec les équipes Enedis

Avec les équipes d’Enedis, nous avons d’abord validé les parcours utilisateurs de chaque persona, et approfondi la compréhension de leurs besoins : quelles données, pour quels types de collectivités, sous quelles formes etc. Puis, lors d’une phase d’idéation, nous les avons accompagnés pour produire collectivement des solutions : outil cartographique dynamique, atelier et vidéo de présentation de l’outil, etc.

Lors du second atelier, nous avons guidé les participants vers l’implémentation concrète des propositions émises collectivement. Nous avons maquetté trois versions du tableau de bord et repensé la notice d’utilisation de manière itérative.

3. La création du tableau de bord

Afin que la nouvelle version de l’outil reste accessible à tous, Enedis a souhaité que nous travaillions avec Excel. Une contrainte ergonomique et un défi esthétique pour nos designers ! Après plusieurs essais et recherches, notre équipe a choisi de recréer une grille de pixels à l’aide des colonnes du tableur. Au sein du tableau de bord final, il est désormais possible de consulter facilement l’ensemble des données de thermosensibilité, de les filtrer à la maille commune, quartier ou rue.

Enfin, à l’intention des nombreux usagers moins à l’aise avec la manipulation de données, nous avons intégré directement au tableur un rapport intitulé “la thermosensibilité de mon territoire”, comprenant des informations personnalisées et mises à jour automatiquement.

Bilan

En chiffres : 2 mois de travail, 10 entretiens, 2 ateliers de co-construction, 87 000 données traitées.

  • Une meilleure connaissance des acteurs et usages liés à la thermosensibilité
  • Des informations claires et adaptées à tous
  • Une interface ergonomique, claire et granulaire
  • Un rapport d’information automatisé et simplifié
  • Un outil d’aide à la décision pour les villes moyennes, à l’avant-garde de la transition écologique et énergétique des territoires.

“Ce service-là, il est indispensable aujourd’hui pour les collectivités, pour parler de la rénovation thermique des bâtiments et identifier les bâtiments qui sont les plus grosses passoires thermiques sur leur territoire ou sur leur patrimoine.”

Représentant territorial d’Enedis

Une application pour faciliter les tournées de secteur en usine

Une application pour faciliter les tournées de secteur en usine 1600 830 Wedo studios

Outil métier

Application

Prototypage

Maquette

Nous avons accompagné l’équipe digitale de Constellium, leader mondial de l’aluminium, dans la conception d’un nouvel outil métier numérique de collecte et d’exploitation des données pour aller vers une maintenance des outils de production augmentée et prédictive.

L’objectif était, tout d’abord, de faciliter la gestion des tournées de secteur pour les techniciens : prise de mesures, détection d’anomalies, consultation de données historisées. L’enjeu, ensuite, était de programmer des interventions et d’éviter toute panne en dehors des préventifs.

Problématique

Comment avons-nous accompagné Constellium dans la conception d’un outil métier à double fonction ?

1. Une journée d’immersion et d’observation en usine

Notre équipe s’est rendue à l’usine Neuf Brisach pour suivre les compagnons électriciens et mécaniciens lors de leurs tournées au cœur des lignes de production, en observant les parcours “automobile et vernissage” et “lavage à froid”. Le shadowing et les entretiens flash ont permis d’identifier les problèmes rencontrés dans les différents parcours selon les métiers, les besoins, et les attentes.

2. Une journée d’atelier de co-création de l’application

Lors d’un atelier réunissant quinze techniciens, nous avons affiné les parcours utilisateurs pour cartographier chaque action, outil, et interlocuteur sollicités. Puis, nous avons guidé les participants dans la hiérarchisation des besoins, sélectionné les fonctionnalités et contenus à intégrer dans l’application et construit son arborescence grâce à la méthode du tri par cartes.

En chambre, nous avons repris les esquisses dessinées en atelier pour proposer des maquettes “fil-de-fer” (wireframes) sur-mesure, ergonomiques et adaptées à l’environnement très spécifique des tournées de secteur : port de gants, faible luminosité, intensité sonore, température élevée, vapeurs et traces de graisse.

À partir de plusieurs tests, basés sur des scénarios d’usage précis tels que le relevé d’un indicateur, le suivi de l’état d’une machine, ou la réalisation d’un dépannage spontané, les techniciens ont évalué la pertinence des maquettes vis-à-vis de leurs besoins concrets.

3. Un mois de prototypage pour une maquette viable de l’application

Les équipes Constellium et Wedo studios ont collaboré pour affiner les fonctionnalités principales des parcours, nous avons particulièrement affiné les fonctionnalités principales des parcours (killer features) : planification des tournées, échanges d’informations avec les compagnons, réalisation des contrôles, collecte et traitement des données. Nous avons amendé notre prototype afin d’obtenir une version optimale pour eux.

Une fois les écrans principaux de l’application validés, nos designers ont réalisé  l’ensemble des écrans secondaires ainsi que les déclinaisons associées pour couvrir tous les cas de navigation possibles. Nous avons ensuite accompagné les équipes chargées du développement du projet, à travers la mise en place d’un cahier des spécifications, pensé comme un référentiel collaboratif, vivant et commun aux designers et aux développeurs.

Bilan

En chiffres : 2 journées d’ethnographie en usine, 1 journée de co-construction, 1 mois d’itération sur la maquette, 65 écrans maquettés et développés.

  • “Moins de curatif, plus de préventif !”, une application qui facilite la maintenance dans les usines tout en prenant en compte les risques terrain.
  • Des équipes qui communiquent et se coordonnent plus facilement
  • Des mesures simplifiées, suivies et comparées dans le temps
  • Un projet réalisé en un temps record : un mois pour observer-tester-maquetter, deux mois pour développer l’application avec notre partenaire

“Travailler avec Wedo studios était une très bonne expérience et j’ai beaucoup apprécié leur méthodologie. Charge à nous d’en extraire toute l’information pertinente, mais il y a de la matière !” 

Vincent d’Albignac, chef de projet digital chez Constellium

Un regard UX sur les applis et services du (self)care : Sport

Un regard UX sur les applis et services du (self)care : Sport 2883 1533 Wedo studios


Un regard UX sur les applis et services du (self)care : Sport

Nous poursuivons notre série “Un regard UX sur les applis du (self) care”, inspirée de l’étude Wellness in 2030 de McKinsey. Nous vous avions parlé de l’apparence et de la pleine conscience. En ce mois de rentrée, focus sur les applis sportives ! 

Avec la crise sanitaire et les confinements successifs, les apps de fitness ont connu une hausse de 40 % des téléchargements dans le monde, permettant à chacun de pouvoir transpirer chez soi. 

Selon data.ai, 71 000 nouvelles applications de santé et de fitness ont été lancées en 2020. De la course à pied, au HIIT en passant par le yoga, le Pilates et la danse, la concurrence est rude, les propositions sont pléthoriques, les choix tentaculaires et les promesses variées. 

Avec ou sans coach ? en collectif ou en autonomie ? Serial joggers ou yogis urbains, accros aux réseaux sociaux ou pratiquants déconnectés, avec ou sans device ? 

Nous avons voulu comparer les onboarding de 8 applications populaires, piochées dans le top 10 2022 et recouvrant les pratiques les plus courantes : Daily Yoga et Down Dog (applications de yoga), Adidas Running et Strava (course à pied), Décathlon Coach et Nike Training Club (fitness) et enfin Dancebit et Everdance (danse).

1 . Qu’est-ce qui vous fait courir ?

Envie de transpirer ? Une option envisageable pourrait être l’application de sport de votre équipementier habituel. Possible également de se fier au top des applis “Forme & Santé” proposé par l’app store. Mais vous pourriez tout aussi bien vous faire alpaguer sur les réseaux sociaux. Les applications profitent alors du dispositif offert par les plateformes comme les posts sponsorisés, pour créer des micro interactions, plutôt convaincantes.

Sélection d’apps de courses à pied par l’app store d’Apple.

Sélection d’apps de courses à pied par l’app store d’Apple.

Le cas d’instagram : devenez la meilleure version de vous-même 

Face au scrolling effréné de l’utilisateur, tout l’enjeu des applications de sport présentes sur la plateforme est de se différencier en quelques secondes. Sur Instagram, réseau social de l’image de soi par excellence, les apps font appel aux biais cognitifs portant sur un idéal d’apparence à atteindre en usant d’animations évocatrices. C’est le cas notamment des apps de fitness et de danse.

La proposition faite joue alors sur les injonctions sociétales et les stéréotypes physiques inspirés des influenceurs ou des personnalités les plus suivies du réseau (cf. Kim Kardashian) : un ventre plat ou des fesses rebondies pour les femmes, des abdominaux définis ou des biceps saillants pour les hommes. L’apparence prime sur la pratique à travers la promesse d’un idéal obtenu grâce à un objectif prédéfini (valeur d’usage).

Post sponsorisé appli yoga

Post sponsorisé d’une une application de yoga qui montre la transformation d’un corps de femme (ventre plat, seins remontés, fessier redessiné) grâce à son utilisation

D’autres applications viennent plutôt titiller votre sentiment d’appartenance, (l’équivalent sportif des propriétaires de produits Apple) en proposant d’intégrer leur communauté pour y partager performances, progrès ou difficultés. L’imaginaire du sport est alors très présent pour les applications de marques historiques telle que Nike ou Adidas dont les reels proposent une imagerie scénarisée rappelant la beauté du sport en tant que valeur collective.

reels adidas instagram

Adidas fait la promotion de son application de running avec un groupe de personnes qui courent ensemble.

Ce qu’on retient 

La concurrence est rude, le choix d’applications est pléthorique, l’étape décisionnelle est cruciale et repose sur :

  • Le lieu de sélection de l’app (RSN, site marchand, apps store),
  • Le recours à la micro interaction comme élément différenciant,
  • La promesse d’un objectif de forme ou de l’appartenance à une communauté sportive.

2. L’onboarding : la promesse du sur-mesure

Première étape de la personnalisation : le profiling. La majorité des applis sportives analysées requièrent la création d’un compte (nom et ou prénom, adresse mail) à l’exception de Decathlon qui propose un mode invité, qui donne directement accès aux différents sports et exercices.

L’illusion de la personnalisation

L’utilisateur·trice est ensuite amené·e à répondre à une série de questions afin d’obtenir un contenu à haute personnalisation.

On remarque que les applications de marques Adidas, Nike, Décathlon, qui disposent déjà d’une notoriété et d’une communauté établie se contentent du minimum (sexe, taille, poids, âge, etc). Elles font preuve d’une certaine universalité face à la pratique sportive.

Les autres applications analysées se trouvent dans l’impératif de se démarquer face à la concurrence et usent de l’hyper personnalisation pour se légitimer. De manière quelque peu intrusive (questions sur les objectifs à atteindre, sur l’emploi du temps, l’alimentation) ?

L’app de Yoga Down Dog se distingue en respectant les préférences sélectionnées en début de parcours, pour proposer un contenu sur-mesure : choix de la musique, du rythme en 5 cadences, du style de Yoga.  L’arborescence est fluide, les choix simples, et le parcours est balisé en 7 étapes, dont l’avancement est matérialisé en haut de l’écran. Le rappel en arrière-plan de postures de Yoga dont l’imagerie est familière même des novices, permet de projeter l’utilisateur dans sa pratique et de maintenir son attention intacte tout du long du parcours de personnalisation.

Down dog

À la création d’un profil Down Dog,l’utilisateur·rice est interrogé·e sur ses capacités et ses préférences en termes de musique, de rythme, de style de yoga, de professeur, etc.

Plus globalement, malgré certains questionnaires de profiling très poussés, le contenu des autres apps analysées nous apparaît plutôt générique, qu’il s’agisse des programmes ou des cours proposés. Cela nous questionne sur l’intérêt de proposer une hyperpersonnalisation qui s’avère illusoire. Est-il très “sport” d’interroger l’utilisateur sur la qualité de ses nuits ou sur son régime alimentaire, dans une injonction constante à s’autodéfinir et s’auto évaluer si le contenu ne suit pas ? 

Notons chez Everdance les illustrations qui accompagnent les réponses aux questionnaires : elles permettent à l’utilisatrice de se projeter dans les univers qui définissent les personas proposés, tout en promouvant une certaine diversité facilitant peut-être l’identification.

Everdance

Questionnaire de départ de l’application Everdance

Du corps actuel au “corps désiré”

Impossible de parler des applications sportives sans mentionner la posture culpabilisatrice parfois adoptée, encourageant l’utilisateur·trice à transformer son corps pour coller aux injonctions sociétales. 

Dis-moi quel corps tu es ! pourrait résumer l’injonction la plus brutale que nous ayons noté sur les applications analysées pour définir des objectifs de performance. Une fois de plus, notons que la dimension psychologique et l’état d’esprit des utilisateurs ne sont pas pris en compte dans l’accompagnement proposé : quid des problématiques de regard sur soi ou de dysmorphie (trouble caractérisé par une obsession sur un « défaut » physique au point d’en devenir une préoccupation majeure, voire délirante) ?

Sur Daily Yoga et Dancebit, l’utilisateur·trice se retrouve inévitablement à devoir choisir entre son “type de corps actuel” (normal, mince, flasque, embonpoint, en surpoids) et son “type de corps désiré” (en formes, athlétique, tout en courbes). La dictature de l’apparence est-elle cohérente avec les valeurs d’élévation spirituelle du Yoga, ou l’aspect ludique de la danse, qu’est-il fait de l’esprit dance like nobody’s watching, qui invite justement à se libérer du regard de l’autre ? 

Chez Daily Yoga, des photographies évoquant des publicités de lingerie permettent de visualiser les différents types de corps pour mieux s’y projeter. Notons que l’embonpoint est statique à la peau pâle et que plus on se rapproche du corps désiré, plus la peau se matifie sur un corps aux postures de naïade ou de bodybuilder. La tablette de chocolat semble le but ultime, en photo ou en illustrations comme sur Dancebit.

Daily yoga

Daily yoga

Dancebit

Dancebit

L’abonnement, l’attrait de l’exclusivité

De façon générale, les abonnements facultatifs permettent de débloquer l’accès à certains contenus ou fonctionnalités, présentés comme premium : des itinéraires de course à pied et leur classement sur Strava, des programmes sportifs et des story runs (podcast pour courir) sur Adidas, des programmes “personnalisés” et des manuels diététiques sur Daily Yoga, etc.

C’est une valeur ajoutée et rentable dont semblent se passer Décathlon Coach et Nike Training Club qui ne proposent aucune option d’abonnement, se rendant accessibles à toutes et tous, dans un bel esprit sportif.

Pour convertir l’utilisateur en client, le travail de l’UX writing est essentiel pour convaincre l’utilisateur·rice que son expérience sera enrichie par l’abonnement et des contenus exclusifs. L’UX writing sert aussi et surtout à engendrer une action, un clic, un achat : “premium” accompagné d’étoiles dorées, “ accès complet”, “essayez le meilleur”. 

On retrouve le procédé pour créer l’appétence envers les options payantes : “le sentier parfait” pour se défouler à petites foulées, “d’autres moyens” des indicateurs de performance supplémentaires ou un des analyses poussées des indicateurs de suivi.

adidas running abonnement

Abonnement Adidas running

strava

Abonnement Strava

Ce qu’on retient 

L’onboarding s’appuie sur la connaissance de l’utilisateur·trice et la personnalisation qui en découle. Les applications sportives cherchent à se différencier dans la relation créée avec l’utilisateur·trice, cependant :

  • La personnalisation n’est pas forcément au diapason des programmes proposés,
  • Les marques à forte identité telles que Nike, Décathlon ou Adidas (valeur perçue), sont les moins intrusives dans leurs questionnaires et profiling,
  • Certaines apps adoptent une posture culpabilisatrice avec l’objectif de transformer le physique sans évaluer la santé mentale ou la perception de soi de l’utilisateur.

3. Au delà du sport, la proposition d’un univers

Un contenu riche, de l’échauffement au coaching

Les applications sportives l’ont compris, pour garder l’attention de l’utilisateur·trice et se démarquer des autres, il faut innover en termes de contenu. 

Il ne suffit plus de proposer de simples cours vidéos, l’utilisateur·trice s’attend à recevoir un réel accompagnement dans son activité physique (voire dans sa vie) avec des programmes tout faits, des conseils nutritionnels ou de bien-être, etc.

Les applications de fitness (Décathlon Coach et Nike Training Club) proposent alors des programmes à thème (“routine réveil musculaire”, “mon défi jog 5km” pour Décathlon, « exploitez le pouvoir de votre cycle” pour Nike) sur plusieurs semaines.

Programme d'entrainement Décathlon Coach
Programme d'entrainement Nike Training

Programmes d’entraînement sur les applications Décathlon coach (à gauche) et Nike training (à droite).

Les applications de danse (Dancebit et Everdance) et de yoga (Down Dog et Daily Yoga) offrent un programme personnalisé sur plusieurs jours, mais la découverte des exercices se fait au jour le jour, dans une volonté de teasing.

Programmes personnalisés sur Everdance, Dancebit et Daily Yoga

Les applications de running (Strava et Adidas Running) ne disposant pas de cours à proprement parler, elles proposent des compagnons à la course à pied. Ils prennent la forme d’outils de mesure de la performance (temps, distance, calories, fréquence cardiaque si on y connecte une montre), de coachs vocaux, de story running (podcast ou livre audio) de musique ou encore d’une communauté passionnée (Strava invite l’utilisateur·trice à rejoindre des clubs, à relever des challenges, à comparer ses performances avec d’autres utilisateur·trice·s,…). 

Au-delà de la pratique sportive, les apps proposent un univers qui s’étend avant et en dehors des séances de sport, à travers les échanges avec la communauté ou les contenus audios.

Les différentes options des applications de running.

Du sport à la pleine conscience, il n’y a qu’un pas

Nous vous en parlions dans notre article sur les applis de mindfulness, la pleine conscience est partout, même dans les applis sportives. En effet, elles sont nombreuses à proposer des fonctionnalités transverses qui se rapprochent fortement du bien-être. 

Ainsi, Daily Yoga possède une section “Écouter” avec des séances de méditation, des musiques de relaxation, des sleepcasts (podcasts pour le sommeil). Nike Training Club et Adidas Running proposent des articles sur le bien-être et la santé mentale.

Du bien-être dans les applis sportives

De gauche à droite : Daily Yoga, Adidas running et Nike Training Club

Des applications aux magasins de sport

En choisissant des applications de marques sportives (Nike Training Club, Décathlon Coach et Adidas Running), nous pensions retrouver des vitrines pour leurs produits ou leurs magasins. Il n’en est rien : tout au long du parcours nous ne retrouvons aucune publicité pour leurs produits. 

Mais ce propos est à nuancer bien sûr car certaines fonctionnalités ou encore la mise en scène (dans les cours vidéos, les photos, etc) des vêtements et équipements de marque témoignent bien d’une certaine volonté de convertir l’utilisateur·trice en client·e·s. En effet, Nike Training Club et Décathlon requièrent de se connecter ou de créer un compte sur les sites des marques pour disposer d’un accès complet aux apps. Ce n’est pas le cas pour Adidas Running, mais l’application dispose d’une fonctionnalité permettant d’enregistrer le modèle de baskets utilisés et d’obtenir des réductions grâce à la carte adiClub, valable dans les magasins Adidas officiels.

TikTok s’invite sur les applis sportives

Quand l’hyper personnalisation et le “coach de vie” ne suffisent plus, certaines applications innovent avec des codes empruntées au réseaux sociaux. 

Everdance offre une option assez particulière qui est de posséder son propre réseau social. Sur un modèle parfaitement identique aux fonctionnalités de TikTok (réseau social par excellence des dance challenges), il est possible de partager, d’aimer et commenter des courtes vidéos de danses : nous retrouvons les boutons coeur, bulle et flèches, disposés comme sur le réseau social connu pour sa grande viralité et ses contenus addictifs.

L’UX n’y est évidemment pas aussi réussie que sur TikTok : 

  • Les vidéos sont lentes au démarrage,
  • La marche à suivre pour ajouter son propre contenu n’est pas claire, 
  • Malgré la complétion du profil (nous n’avons jamais reçu l’email de confirmation), il n’est pas possible de lire les commentaires ou de partager les vidéos.
Everdance a son propre réseau social à l'image de TikTok

Applications de sport, une promesse mitigée

Les applications sportives ont toutes leurs spécificités et n’accompagnent pas leurs utilisateur·rice·s de la même manière.

Certaines applications favorisent un engagement positif des utilisateur·rice·s avec des récompenses (Nike Training Club, Strava et Adidas Running), des conseils sur le bien-être notamment (Nike Training Club, Adidas Running) et parfois une communauté avec qui échanger (Adidas Running, Strava, Daily Yoga). Ces applications se concentrent sur la pratique sportive et la forte désirabilité de l’image de la marque, auprès notamment de ses (futurs) clients.

D’autres sont, au contraire, culpabilisatrices et centrées sur l’apparence, incitent franchement à la perte de poids avec des questions sur le sujet dès l’onboarding, un suivi systématique du poids ou encore des publicités pour des programmes et des manuels diététiques. Reste à savoir si la promesse du “corps désiré” est tenue, et si le procédé ne contribue pas à perpétuer des stéréotypes d’apparence, prégnants notamment sur le marché nord-américain et pouvant nuire à la santé mentale.

On remarque d’ailleurs que certaines applications ont des contenus plus inclusifs avec une représentation de genres, de corps, d’âge et de cultures diverses alors que d’autres se cantonnent à la mise en avant de personnes cisgenres, blanches et minces.

Le fitness ne représente qu’un seul aspect du marché du bien-être qui vaudrait 1,5 milliards de dollars. Nous vous avons déjà parlé de la mindfulness et de l’apparence, bientôt nous vous parlerons également de la nutrition, du sommeil et de la santé.